Petit récit de mes deux vols ratés de dimanche

Dimanche, il était annoncé une forte chaleur, avec une bonne instabilité, et du vent de sud, plus fort coté Préalpes.
Aucune obligation... Allez, je me décide, c'est l'occasion d'aller essayer de faire un cross depuis Les Richards vers le nord.
Après quelques tentatives infructueuses de covoiturage, je dois m'organiser tout seul.
Départ à 8h05, après avoir rempli mes devoirs électoraux dès l'ouverture :-)
Je laisse ma voiture à Vizille, et continue en stop du pied de la côte de Laffray.
Le stop marche bien, et 4 voitures plus tard je me retrouve au pied de la montée des Richards.
(Coïncidence improbable, une des 4 voitures était conduite par ma belle soeur, qui passait par là par hasard!)
Là, par contre, il ne passe personne. La montée n'étant pas très longue, je l'attaque à pied.
De nombreuses voitures descendent (voter?), mais personne ne monte.
Une 1ère voiture me rattrape à mi-chemin. Ce sont des parapentistes du GUC. Leur voiture en pleine, mais ils me déchargent de ma voile.
Une seconde me prend un peu plus tard, et m'avance d'un km. Au final j'arrive en haut une douzaine de minutes après le groupe du GUC.

Le déco des Richards, avec le groupe du GUC prêt à décoller:

Les conditions ont l'air excellentes, et je me prépare rapidement en regardant les gars du GUC disparaître derrière le Pallastre.
Un pilote local décolle; Je le suis 30s plus tard... Et tous les deux faisons un tas spectaculaire! Rien. Pas le moindre soupçon d'ascendance. On n’atteint même pas l'atterro officiel.
Coup de pot, le pilote local me propose un deal: Il me replie ma voile pendant que je vais chercher sa voiture à l'atterro, et il me remonte. Deal.

Deuxième déco une grosse heure plus tard.
Les conditions ne semblent pas différentes de la 1ère fois, mais ce coup ci ça marche les doigts dans le nez.
À posteriori je comprends que j'avais fait une erreur la 1ère fois: J'avais décollé dans l'axe du déco, face à la vallée.
Puis j'avais basculé par dessus l'épaule des Richards, pour traverser le ravin, et rejoindre l'arête sud-est du Palastre.
La seconde, j'ai décollé coté ravin, longé l'épaule coté au vent, puis traversé le ravin.
La différence c'est que du coté au vent de l'épaule ça portait bien, et j'ai attaqué la traversée du ravin en partant de 50m plus haut.
Et ces 50m, ça fait la différence entre arriver en bas du pierrier en face, ou au milieu du dit pierrier, d'où ça repart beaucoup plus facilement.

Le début du vol est assez facile. Ça monte bien sur le Pallastre, et j’enchaîne les faces sud, avec des plafonds approchant bientôt les 3000m.

Le Champsaur et le pic de Bure, vus en transition du Palastre au Queyrel:

En l'air, 10 à 15 km/h de vent de sud-ouest, qui me pousseront gentiment pendant tout le vol.

Au Petit Chaillol, je fais mon meilleur plafond de la journée, à 3100m. On aperçoit le lac du Sautet, et la cuvette grenobloise dans le lointain:

Transition par dessus le Valgaudemar:

À l'arrivée au Grun de St Maurice, je rattrape un autre groupe (ceux du GUC, je suppose)... Eux montent, moi pas. Argh!
Je cafouille un bon moment dans un air très turbulent, arrive au dessus de la crête, mais loin du plafond.
Pas grave, eux enroulent maintenant au dessus de La Sallette, je n'ai qu'à suivre la crête et faire de même.
Sauf qu'à La Sallette, je me maintiens bien en dynamique au dessus de la crête, mais là non plus je ne trouve pas leur ascendance. :-(
Pourquoi perdre du temps à la chercher, alors qu'un magnifique cumulus me tend les bras juste en face au dessus d'Entraigues...
Je traverse le Valjouffrey, et effectivement ça remonte facilement sur l'Arcanier jusqu'au nuage :-)

Transition par dessus le Valbonnais. La Mure au fond à droite:

J'arrive bien placé sur l'arête sud du Coiro, et trouve rapidement une excellente pompe qui me remonte plus haut que le sommet.
Ça me permet de rejoindre directement le sommet, ce qui est bien plus confortable que de forcer le passage sous le vent de l'arête ouest comme l'an dernier.
La suite est un plaisir, tout droit, poussé par le vent, sous une magnifique rue de nuages jusqu'au Taillefer.

Le col Plancol, entre Taillefer et Grand Armet; Le col d'Ornon est juste derrière en contrebas; Le Rochail au fond:

Au Taillefer, je m'attarde pour le plaisir, et mitraille tous les coins où je suis allé me promener à pied ou à ski.

La station de ski de L'Alpe du Grand Serre:

Le Coiro à gauche, le Tabor à droite, l'Obiou au fond:

A gauche sous le nuage, le plateau du Poursolet, et celui du lac Fourchu. A droite, le sommet du Taillefer.

Transition par dessus la vallée de la Romanche.
Long plané vers le Col Luitel, puis comme visiblement ça passe largement, j'oblique progressivement vers Chamrousse.
Là encore je mitraille.

Le lac Luitel, en voie d'envasement:

Chamrousse:

Arrivée quelques dizaines de mètres au dessus de l'aiguillette, où de nombreux pilotes se préparent, ou sont déjà en l'air.
Par contre, ici, les conditions sont nettement moins bonnes, et c'est visiblement beaucoup plus difficile de monter.
Les plafonds sur Belledonne sont bien plus bas qu'en Oisans, juste au niveau du sommet du Grand Colon. (2400m)
Pour éviter la foule, je continue vers l'arête de l'autre coté de la combe de Casserousse, où d'habitude ça monte bien.
Cette fois c'est anémique, et j'ai bien de la peine à gagner quelques dizaine de mètres. Un peu plus loin, l'arête Chapelet me sauve, avec 250m de gain.
Je me jette sur le Grand Colon qui, fidèle à sa réputation, me permet enfin de remonter rapidement jusqu'au nuage.

Le lac du Crozet. Le niveau est très bas, et il est coupé en deux:

La suite le long de Belledone est beaucoup plus facile que ce que je craignais:
Les ascendances sont faibles, mais toutes les faces sud-ouest donnent et me remontent au nuage.
Et le vent de sud-ouest qui pousse aide à ne pas trop perdre dans les transitions: Je reste tout le long entre 2000 et 2400m.

Transition sur la Bédina. Vue sur Prapoutel et le Jas du Lièvre:

Sur Prapoutel, quelques voiles m'aident à baliser le thermique, et à progresser alors que c'est presque tout à l'ombre.
Au Grand Rocher, toute la suite de la crête est au soleil, et ça remonte enfin bien.
Mais dilemme: Faut-il continuer, ou faire demi-tour, et rentrer récupérer ma voiture à Vizille?
Si je fais demi-tour, le gros risque c'est que là je vais avoir le vent de face, et je vais perdre beaucoup plus d'altitude dans chaque transition.
Pas sûr que les ascendances soient suffisantes pour me remonter de tout en bas.
À l'inverse, il y a de beaux nuages sur les hautes crêtes de Belledonne, et ça semble plus facile de continuer là bas, malgré les plafonds bas.
Allez c'est décidé, je continue le plus loin possible. Je transite par dessus La Ferrière vers un beau cumulus.

Mais catastrophe, le cumulus en question ne donne strictement rien, et je commence à craindre une vache compliquée, avec un retour encore plus compliqué!
Je continue au cas où sur les pics de Berlanche et là miracle, ça remonte tout doux dans une zone entièrement à l'ombre. Allez comprendre.
À nouveau au nuage, je transite vers le Grand Charnier. Là encore, c'est tout doux, et ça me remonte au nuage.

Je suis tout seul. Bizarrement personne ne vole à Allevard. Je savoure mon plaisir dans une aérologie de velours!

J’enchaîne vers Val Pelouse.

Les Grands Moulins, jusqu'au fond de la vallée de St Hugon:

À Val Pelouse, surprise, changement d'ambiance, il y a foule: Apparemment c'est une rave party, avec une sono géante qui fait BOOM BOOM BOOM à un km à la ronde.
Je fais le spectacle en cherchant un bon moment la pompe devant le déco. Finalement je la trouve, et peux fuir cette ambiance bruyante.

Le Grand Arc, le Mont Blanc, le sommet du Grand Chat, vus en transition vers la montagne de Presle au 1er plan:

À la Montagne de Presle c'est beaucoup plus calme, et beaucoup plus facile. Je trouve le thermique direct, et il me remonte lentement mais sûrement au nuage.
C'est tellement agréable que je le quitte a regrets pour aller voir plus loin.
Au sommet du Grand Chat, ça sent la fin: Les barbules au dessus sont en voie de disparaître.
Je remonte assez facilement jusqu'au sommet, mais impossible de monter bien plus haut.
Après un bon moment à balayer la crête dans tous les sens, je renonce.
Là, restent deux possibilités: Traverser la Maurienne et faire une dernière tentative sur la Lauzière, où il reste un cumulus.
Ou alors traverser la Vallée des Huiles, et aller poser vers Chamoux.
Soupçonnant que l'ascendance de la Lauzière ne durerait probablement plus beaucoup longtemps, j'opte pour la seconde solution.
Très long plané dans l'air calme du soir, de plus en plus chaud. Puis franchement brûlant. Mais qui a coupé la clim?
Finalement un soupçon de restit sur les parois boisées de Chamoux me porte plus loin que je l'espérais, et je pose au delà d'Aiton, liquéfié sous mes 2 pull-overs, et ma combinaison épaisse.

Épilogue. La Savoie est moins généreuse que la Matheysine ou le Champsaur.
Au bout d'une heure de stop totalement infructueux, le soleil disparaît, et les moustiques attaquent.
Je me résous à appeler Danielle à l'aide pour le retour au bercail. Merci à elle.
Lundi, une collègue m'a descendu à Eybens, où un coup de bus et un coup de stop m'ont permis de récupérer ma voiture à Vizille.

PS. Alors pourquoi vols ratés?
Le premier vol était évidemment raté. Mais ce second?
Et bien, je ne devrais pas m'en vanter, mais mon détour derrière Entraigues était une grosse erreur:
Je l'avais oublié, mais l'Arcanier est dans la zone protégée du coeur du Parc National des Écrins. Et à ce titre le vol y est interdit jusqu'au 30 juin, pour protéger la nidification des oiseaux.
Ce vol était donc illégal, et ne comptera pas pour le classement. Il n'a jamais eu lieu. N'en parlez à personne ;-)